Opinion Outre-Mer
07H57 - mardi 20 mai 2025

Tahiti : run sauvage à Fare Ute, un accident spectaculaire

 

Dimanche soir, la zone industrielle de Fare Ute a été le théâtre d’un accident spectaculaire : un pilote de deux-roues, lancé en wheeling, a percuté une voiture qui driftait sur le même tronçon, provoquant la chute du motard et des dégâts à plusieurs véhicules. Malgré la présence tardive des forces de l’ordre — 200 contrôles et neuf verbalisations avaient déjà eu lieu — la scène illustre la difficulté à endiguer ces rodéos urbains qui attirent jusqu’à 500 passionnés et curieux chaque dimanche.

Le motard, éjecté au sol et identifié comme un jeune homme en scooter, s’en est heureusement sorti sans blessure grave. « C’était choquant, on n’avait jamais vu d’accident ici », confie Ryan, 18 ans, témoin du choc. Le drifteur, âgé de 21 ans, a échangé quelques mots avec son adversaire involontaire en tentant de s’enquérir de son état — avant de perdre une dent, frappé pour avoir exprimé ses excuses. Tous deux reconnaissent à demi-mot l’illégalité de ces runs, mais en appellent à la création d’un « spot » sécurisé : « Chacun est responsable, mais on aimerait bien un lieu pour pratiquer sans se cacher », explique le pilote de la voiture.

Entre passion pour les sensations fortes et inquiétude croissante pour la sécurité, les runners plaident pour un compromis : un circuit isolé et encadré, à l’image de Vaitarua à Papeari, aujourd’hui réservé aux compétitions. Associations, jeunes riders et mécaniciens — dont Charles, alias « Le Responsable », et Mana Tua Bennett, rider activiste — réclament un espace officiel, clôturé et réglementé, plutôt que des rassemblements hors-la-loi.

Le gouvernement territorial semble entendre cet appel : Nahema Temarii, ministre des Sports et de la Jeunesse, annonce qu’un plan de réaménagement de Vaitarua pour l’allonger à 400 m et la co-construire avec les associations doit être présenté fin mai. Une seconde piste est aussi à l’étude. En attendant, la police nationale intensifiera les opérations : « Nous mobiliserons davantage d’effectifs pour empêcher ces rodéos illégaux », prévient le commandant Tamatea Tuheiava, rappelant que ce « rodéo urbain » est passible d’un an de prison et de 1,8 million Fcfp d’amende.

Ce double discours — répression à court terme et projet de piste encadrée — illustre le défi : concilier la passion des jeunes pour la vitesse et la sécurité de tous. La réussite de cette transition dépendra de la rapidité à offrir une alternative légale, avant que le prochain run ne tourne au drame.

 

Patrice Clech

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