Opinion Outre-Mer
17H44 - lundi 19 mai 2025

Grève des taxis à La Réunion : la mobilisation monte contre la tarification médicale

 

Ce lundi 19 mai, tandis que les élèves faisaient leur rentrée, La Réunion a assisté à l’union inédite de près de 300 chauffeurs de taxi — la moitié de la profession — déterminés à bloquer le transport sanitaire sur toute l’île. Dès l’aube, ils ont déployé leurs véhicules aux quatre coins, informant hôpitaux et cliniques qu’aucun patient ne serait conduit vers ou depuis un établissement médical : un message clair aux autorités et à la Sécurité sociale.

Aux abords du Barachois et devant la préfecture, leurs files de voitures noires et jaunes ont vite perturbé la circulation. À 14 h, une délégation devait rencontrer en urgence le directeur de cabinet pour exiger la révision d’une convention-cadre nationale qui, selon eux, menace leurs revenus : un tarif unique de 13 € par transport médical pris en charge réglementairement.

« Si ce barème s’applique tel quel, c’est 40 % de notre chiffre d’affaires qui s’envole », alerte Hugues Atchy, président de la Fédération des taxis indépendants 974. Sur une île dense et vieillissante, où plus d’un million de trajets sanitaires sont effectués chaque année, les taxis assurent plus de la moitié des transports médicaux : consultations, dialyses, radiothérapies…

Jusqu’à présent, ces courses relevaient d’un système de tarification dégressif — base fixe, majorations kilométriques, attente —, qui prenait en compte la complexité et la durée réelle du trajet. La nouvelle convention, encore en cours d’examen gouvernemental pour une entrée en vigueur au 1ᵉʳ octobre, uniformise tout à 13 €, quelle que soit la distance, le temps d’attente ou le matériel médical à bord.

L’intersyndicale, ralliée spontanément par l’ensemble des syndicats réunionnais, réclame une adaptation spécifique aux Outre-mer : prise en compte des reliefs montagneux, des embouteillages, et du coût plus élevé de l’entretien des véhicules. Sans cette souplesse, redoutent les professionnels, le transport médical deviendra non rentable, au risque de pénaliser les patients les plus fragiles.

Dans l’immédiat, le mouvement risque de durer : la profession s’est donnée pour consigne de maintenir le blocage jusqu’à obtention de garanties écrites. Les élus locaux, déjà saisies, craignent une crise sanitaire si l’absentéisme des taxis perdure, et appellent à une médiation rapide.

À quelques mois de l’hiver austral, où les besoins en transports sanitaires s’intensifieront, la partie s’annonce tendue. Les conducteurs ont clairement fait passer leur message : pour que chacun puisse toujours rejoindre son rendez-vous médical, la tarification ne saurait être une simple copie conforme de celle de l’Hexagone. Sur une île où chaque virage et chaque bouchon pèsent lourd, le prix de la course doit refléter la réalité du terrain.

 

Patrice Clech

 

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