Opinion Outre-Mer
11H47 - jeudi 8 mai 2025

8 mai : la France peut dire merci à ses Outre-mer. L’édito de Michel Taube

 
allée de la dissidence - Fort de France - Martinique

 

Le 8 mai 1945, la capitulation sans condition de l’Allemagne nazie mettait officiellement fin à la Seconde Guerre mondiale en Europe. Il fallut attendre encore le 2 septembre 1945 et la capitulation du Japon pour que le monde respire enfin. Mais la France, ce jour-là, recouvrait son honneur, sa liberté, sa souveraineté. Et elle ne le doit pas qu’à de Gaulle, à la Résistance intérieure ou aux Alliés : elle le doit aussi à ses enfants d’Outre-mer.

Ils furent des dizaines de milliers, Antillais, Réunionnais, Guyanais, Kanak, Mahorais, Polynésiens, Martiniquais, Guadeloupéens, à s’engager dans les Forces françaises libres, parfois dès 1940, alors même que l’Hexagone capitulait. Beaucoup rejoignirent les rangs de la 1re armée française du général de Lattre de Tassigny, et participèrent aux campagnes de Tunisie, d’Italie, de Provence puis d’Alsace. Ces soldats venus des îles, de la brousse ou des lagons sont souvent tombés dans l’oubli de la mémoire nationale. Pourtant, c’est aussi par leur sang que la France a pu se libérer.

La géopolitique mondiale du conflit, elle aussi, ne peut être comprise sans le rôle stratégique des Outre-mer. Des territoires comme la Nouvelle-Calédonie ont servi de base arrière aux Américains dans la guerre du Pacifique contre le Japon. La Réunion, les Comores et Madagascar ont permis de sécuriser les routes maritimes. La France libre de De Gaulle, sans terre, trouva en Afrique équatoriale française et dans les Outre-mer ses premiers points d’appui diplomatique, militaire et logistique. Ces territoires ont offert à la Résistance un socle vital, une base géopolitique irremplaçable.

Mais s’il est un territoire qui incarne ce double engagement patriotique et stratégique, c’est bien la Martinique. En 1940, l’île est restée loyale à Vichy par le biais de l’amiral Robert. Pourtant, la population, elle, bouillonnait de ferveur gaulliste. De nombreux jeunes martiniquais se sont enfuis clandestinement vers les îles anglophones voisines, notamment Sainte-Lucie, pour rejoindre les Forces françaises libres. Ce fut un acte de bravoure, souvent au péril de leur vie. Par la suite, la Martinique a accueilli des navires militaires, des réfugiés, des ressources. Elle a tenu, résisté, et contribué, à sa manière, à la réintégration de la France dans le concert des nations libres.

Alors, en ce 8 mai 2025, que l’on se garde bien d’oublier les territoires d’Outre-mer. Sans eux, sans leur fidélité, sans leur courage, sans leur géographie même, la France aurait peut-être été effacée de l’Histoire. La mémoire nationale leur doit une reconnaissance entière, pas seulement cérémonielle mais politique, culturelle et éducative. La France libre ne fut jamais uniquement hexagonale. Elle fut aussi ultramarine.

 

Michel Taube

Directeur de la publication

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